Faire l'éloge de l'ennui , voilà qui peut déranger la plupart des Parents actuels, soucieux des performances de leurs enfants , souhaitant qu'ils utilisent au maximum le temps extra-scolaire pour continuer à apprendre, réfléchir, acquérir de nouvelles compétences ...( voire même multiplier les activités, ainsi mettre la pression et exiger des performances ) ...mais surtout " ne pas rester sans rien faire "...or, plusieurs spécialistes de l'enfance affirment que « L'ENNUI EST VITAL ! ».
Sa plainte est un appel à l’adulte pour l’occuper, lui épargner la difficulté d’apprivoiser le vide.
👫 Obsolète l’ennui ?
La culture ambiante empreinte
de valeurs consuméristes, de rentabilité, de performance déteste ces
bulles de rien… La surabondance participe à la mauvaise réputation de
l’ennui. Notre environnement saturé de bruits, mouvements, écrans,
divertissements…rend difficile la confrontation à soi-même.
Les
enfants sont emportés dans cette agitation qui leur complique le
nécessaire travail d’apprivoiser l’ennui, nourriture essentielle pour
grandir et dont l’apprentissage dure toute une vie.
👫 S’ennuyer dès le plus jeune âge
Dans les tout
premiers moments de vie du bébé, la présence du parent est nécessaire
pour répondre à chacun de ses besoins : le nourrir, le bercer, le
rassurer, … Le tout-petit étant incapable de patienter ou de postposer
ses désirs. Progressivement, le bébé est confronté aux absences
inévitables et nécessaires de son parent et apprend à faire avec ces
absences. Pour patienter, il va se mettre à explorer sa bouche, son
corps, un coin du tapis, un hochet, exploration qui sera l’occasion de
belles découvertes : sa bouche est faite de multiples aspérités, le
tapis est tout doux contre sa joue, …
Dans ces interstices offerts
par ses parents, le bébé devient capable de se créer une image de sa
maman ou de son papa, d’anticiper le plaisir des retrouvailles, le goût
du lait qu’il va boire…
A partir de cette alternance nécessaire de présence/absence de ses parents, sa pensée se construit et il découvre le plaisir de jouer avec elle. Le vide est nécessaire pour permettre à l’imaginaire de l’enfant de se développer. Poussé à patienter, il s’imagine son parent, l’objet convoité… Du vide, il fait naître du plein. Grâce à cette capacité d’imaginer, il devient capable de composer avec son désir, de surseoir à sa réalisation voire même d’en supporter sa non-réalisation au bénéfice d’autre chose.
C’est également grâce à l’absence de son parent, en contrepoint de sa présence ajustée, que le bébé découvre qu’il est un autre, qu’il ne fait pas qu’un avec lui. Il prend conscience de son altérité.
👫 L’ennui terreau de la croissance psychique
Riche
de ses premières expériences, l’enfant qui grandit apprend à
apprivoiser ces moments de « rien » : d’abord désœuvré, son esprit
vagabonde, il imagine un ailleurs, dessine un futur, rêve de folles
aventures… et le voilà, parti de rien, en pleine créativité.
Il découvre le plaisir de faire germer quelque chose qui trouve sa
source en lui. Et mis bout à bout, ces temps vont l’aider à se
construire, à prendre conscience de lui-même, lui permettre de faire
connaissance avec son environnement, de découvrir qui il est, ce qu’il
aime, ses aspirations pour ‘quand il sera grand’.
Nombreux sont les
adultes qui témoignent que ce sont des moments d’ennui qui leur ont
permis de se découvrir une passion : écrire, dessiner, lire,
photographier…
👫 L’ennui n’est pas désœuvrement
Pour que l’ennui
soit bénéfique à l’enfant, un environnement attentif et stimulant lui
est indispensable : soins, encouragements, rencontres, discussions,
activités… C’est au travers de ce soutien parental, des supports de
découvertes qui lui sont offerts que l’enfant se développe et grandit.
Le
manque d’attention bienveillante, la négligence sont nocifs pour sa
construction, ils entravent sa croissance psychique et le freinent dans
son développement sensori-moteur, cognitif et affectif.
👫 La posture de l’adulte
En tant qu’adultes, face
aux jérémiades d’un enfant qui s’ennuie, il est souvent plus facile de
le mettre devant un écran, de faire avec lui ou de proposer des
solutions toutes faites plutôt que de résister et de le renvoyer à
lui-même. Parce que nous sommes nous-mêmes souvent
englués dans le trop plein, nous voulons à tout prix lui épargner ces
moments qui, enfant, nous étaient désagréables ou que nous supportons
encore difficilement.
Ne pas céder, résister aux réponses
occupationnelles nécessite d’avoir confiance en soi et en l’enfant.
Faire le pari qu’au-delà de ses plaintes peuvent naître de belles
choses.
Si l’enfant est sans cesse occupé, pris dans une perpétuelle consommation et sans retour à lui-même, aucune place n’est possible pour faire naître la créativité et le désir. Cette petite flamme qui nous appartient, qui trouve sa source dans l’attente. Plus on attend, plus le désir grandit. Or, si l’enfant reçoit sans avoir demandé, le feu n’a pas le temps de s’embraser. Et l’enfant privé de cette attente, de ces temps suspendus, risque d’être voué à exister pour avoir.
👫 La place de l’éducateur
A l’école, dans les
loisirs, … il est parfois difficile de résister aux sirènes de la
rentabilité, de la performance, de la vitesse.
Alléger la journée
des enfants, laisser du temps au rien, à l’activité libre, ne pas
systématiquement leur proposer une occupation lorsqu’ils ont terminé
plus vite que les autres… leur permet aussi de construire leur pensée,
de stimuler leur soif de découvertes et leur plaisir d’apprendre.
Les capacités créatrices, d’imagination, d’autonomie, de connaissance de soi… se fondent sur ces alternances d’attention, de présence et d’absences.
👍 Sophie Marianopoulos ...Psychologue clinicienne et psychanalyste, exerce à l'Hôpital Mère-Enfants du CHU de Nantes. Engagée dans la reconnaissance de la santé psychique comme faisant partie intégrante des questions de santé publique, elle est fondatrice de l'association pour la Prévention et la Promotion de la Santé psychique (PPSP) et de son lieu d'accueil les Pâtes au Beurre.
Dans cette vidéo, elle incite à
« Apprendre à s'ennuyer dès l'enfance»
L’enfant doit apprendre progressivement à supporter d’être seul, à occuper l’espace en dehors d’un autre pour mener ses propres expériences, expériences fondatrices de sa pensée et de sa construction au monde.
Supporter ces temps seul démarre dès le plus jeune âge où déjà le tout petit « profitera » du bref instant d’attente pour explorer sa bouche, découvrir le mouvement de ses mains…Ainsi, peu à peu, l’enfant apprivoise ces moments de vide pour se construire.
👍 Claire Meersseman (02:51), psychologue clinicienne, psychothérapeute et thérapeute familiale pose cette question pertinente
« l'ennui, vide créateur ou vide angoissant »
La capacité créative de chacun face à l’ennui dépend des premières
expériences de son enfance, de la présence et de l’absence attentive de
son parent. Cette attention ajustée de l’adulte permet à l’enfant
d’apprivoiser peu à peu sa capacité d’être seul, d’appréhender sa
singularité et de construire sa pensée.
A l’inverse, quand l’enfant a été négligé ou délaissé, il ne dispose pas
de la sécurité nécessaire et reste en panne de cet élan créateur
nécessaire pour dépasser le désœuvrement premier face au vide.
👫quelles sont les vertus de l'ennui à l'adolescence ?
👫la place de l'adulte dans le jeu libre de l'enfant...
Pour grandir, l’enfant a besoin de moments pour s’ennuyer. Cela lui offre l’occasion de découvrir ce qui va vraiment l’animer, lui laisse l’opportunité de se perdre dans ses pensées, de rêver, de créer… Il découvre le plaisir de faire germer quelque chose qui trouve sa source en lui. Petit à petit, il découvre qui il est, ce qu’il aime, ses aspirations, ses intérêts… Mais quel parent, éducateur n’a jamais entendu cette plainte « Je m’ennuiiiiie ». Difficile de résister, de renvoyer l’enfant à lui-même, plutôt que de lui proposer une solution toute faite, d’allumer un écran… Personne n’aime s’ennuyer mais pourtant avoir du temps de vide permet à chacun, enfant comme adulte, de se ressourcer, de se recentrer sur soi. Etre bien être bien avec soi-même sans avoir sans cesse besoin de stimulations, d’occupations, de l’autre pour se sentir bien