* constats : « il se fiche de tout ,il ne s'intéresse à rien , il ne respecte rien ..» Cette plainte de parents exaspérés et désespérés de leur impuissance est souvent entendue par les psys ; elle fait écho à celle de la société : « comment mettre à ces jeunes un peu de plomb dans la tête ? comment leur transmettre des valeurs qui leur permettraient de sortir de l'errance : le goût du travail et de l'effort , le respect des biens , celui des personnes , etc...?» .
* Comment ?
° en faisant des leçons de morale à l'école , proposait récemment un ministre : intention louable mais opération qui n'aura pas les effets escomptés selon le postulat implicite : la morale serait affaire de conviction : « on pourrait donc convaincre les enfants de son bien -fondé en la leur enseignant comme on enseigne le code de la route ; ainsi devenus capables de distinguer les sens interdits de ceux qui ne le sont pas , ces enfants pourraient enfin régler laur conduite sur les lois communes ...»
° mais la pratique psychanalytique démontre le contraire : « les bonnes manières ne peuvent pas s'enseigner car elles ont leurs racines dans l'inconscient ...»
° ce constat vaut pour LA POLITESSE : rapport de soi à l'autre . Ex : tenir la porte à une personne âgée implique que l'on prenne acte de son existence , de son âge ...ce qui ne va pas de soi .- et également pour les valeurs morales : probité , courage , sens des responsabilités: l'enfant ne les apprend pas comme des tables de multiplication :
* il se construit ou non avec ces valeurs
* selon l'éducation qu'il reçoit , à condition que cette éducation ne se limite pas au discours
ex: savoir que l'on ne doit pas voler et le savoir assez pour que cela retienne la main au moment où celle-ci pourrait s'emparer de l'objet convoité , ne relève pas seulement de l'adhésion consciente à une règle sociale .
C'EST LE PRODUIT D'UNE LONGUE ÉVOLUTION QUI COMMENCE DÈS LE BERCEAU ET QUI N'IMPLIQUE PAS SEULEMENT LA TÊTE MAIS AUSSI LE CORPS.
1. IL N'Y A PAS QUE LE PLAISIR DANS LA VIE !
° Pour parvenir à avoir des valeurs , il est nécessaire de prendre conscience que la valeur existe : savoir qu'il y a des choses qui valent plus que le plaisir immédiat , qui valent même que l'on suspende , voire que l'on sacrifie ce plaisir immédiat et cela ne se fait pas tout seul !
° Pour le nourrisson , la seule valeur c'est le plaisir lié à la satisfaction de ses besoins mais aussi aux émois que provoquent les soins de ses parents -émois dont Freud nous dit , qui constituent la sexualité infantile : le biberon ou le sein apaise la faim du bébé mais lui fait découvrir au niveau de la bouche des sensations voluptueuses .
° Une fois ces voluptés découvertes , l'enfant n'aura de cesse qu'elles se reproduisent et il les ferait sans doute se répéter indéfiniment si les parents n'intervenaient pas , en le sevrant : « tu es trop grand maintenant pour têter » et en l'initiant à l'alimentation à la cuillère , les parents posent un interdit sur la répétition de ce plaisir : ils empêchent l'enfant de s'enliser dans une jouissance qui serait pour lui mortifère car elle entraverait son développement : on ne peut pas têter jusqu'à 25 ans . Ainsi ils l'obligent à avancer .
* 1ère leçon quant aux valeurs : le plaisir immédiat ne peut être dans la vie le seul guide : il existe des choses , en l'occurrence GRANDIR qui valent plus que ce plaisir .
° cette 1ère leçon sera suivie de beaucoup d'autres : les parents vont agir ainsi à chaque étape du développement de l'enfant .Françoise Dolto appelle cela :LES CASTRATIONS
° CASTRATIONS qui ne relèvent ni de la frustration, ni de la répression car les parents n'obligent l'enfant à renoncer à ses plaisirs passés que pour lui permettre d'accéder à de nouvelles découvertes . « Tu n'es plus un tout petit bébé qui ne pouvait que téter , tu deviens grand et bientôt avec ta bouche de grand , tu pourras parler » ..passage toujours difficile pour l'enfant car il doit lâcher la proie pour l'ombre , difficile aussi pour les parents qui doivent en effet renoncer , eux aussi , aux plaisirs qu'ils partageaient avec l'enfant et de plus , supporter de le voir souffrir tant qu'il n'a pas complétement accepté le changement .
2. ON NE PEUT PAS TOUT FAIRE "POUR DE VRAI "
° parmi les castrations que les parents doivent donner , 2 sont fondamentales pour l'acquisition des valeurs morales : la castration anale et la castration oedipienne ( voir plus loin )
° Françoise Dolto : entre 24 et 28 mois , âge auquel l'enfant acquiert la maîtrise de ses sphincters ( la propreté ) , la castration anale va permettre à l'enfant l'accés à l'autonomie dont il est capable pour tous les gestes du quotidien : manger , se laver , s'habiller , se coucher , aller aux toilettes : l'enfant ne peut parvenir à cette autonomie que si ses parents , après lui avoir donné des explications techniques dont il a besoin , l'exigent de lui ; c'est une étape douloureuse à franchir *pour lui car elle le contraint à renoncer aux privautés physiques ( toilette , habillage etc ...) qu'il avait avec ses parents * douloureuse aussi pour les parents qui doivent accepter de le lâcher , de le laisser se débrouiller tout seul , mais c'est une étape décisive pour l'acquisition des valeurs morales pour 2 raisons: faire la différence entre fantasme et réalité et acquisition de l'autonomie .
3. FAIRE LA DIFFÉRENCE ENTRE FANTASME ET RÉALITE ...
° se débrouiller seul permet à l'enfant de faire pour la 1ère fois de sa vie , la distinction entre le fantasme et la réalité : imaginer que l'on boutonne son manteau , le penser ou le dire est une chose, le faire réellement en est une autre : les doigts réels ne sont jamais aussi magiques que ceux dont on rêvait !
° " faire tout seul " implique que l'on passe de la toute puissance imaginaire à la puissance réelle qui demande travail et effort : en apprenant l'autonomie , l'enfant devient capable de faire la différence entre les choses qui sont "pour de vrai " et celles qui ne le sont pas ; c'est la condition essentielle pour qu'il puisse comprendre que l'on ne peut pas faire " pour de vrai " toutes les choses que l'on pense ou imagine.
° qu'est-ce que l'autonomie ? l'enfant qui avait besoin des mains de son père ou de sa mère pour faire "un " va faire "un " à lui tout seul : « j'ai une tête , 2 pieds , 2 mains et avec cela j'assure sans l'aide de personne ! » Ce qui va lui permettre d'être "un parmi les autres " , et ainsi accéder à la socialisation , fondamentale à l'aquisition des valeurs !
° C'est seulement au moment où il peut être "un à lui tout seul " que l'enfant devient capable de se mettre à la place d'un autre et par conséquent de comprendre qu'il ne doit pas faire à cet autre ce qu'il ne voudrait pas qu'on lui fasse .
° L'autonomie , c'est aussi intégrer les interdits sociaux qui , à cet âge , doivent lui être dits : interdit de se faire du mal et de faire mal aux autres , interdit de meurtre, de vandalisme , de vol : on n'agresse pas , on ne prend pas leurs biens , on ne casse pas leurs affaires , on doit prendre soin de soi et ne pas mettre les autres en danger .
° Quand, à l'adolescence , violence et délinquance explosent , elles renvoient toujours aux valeurs qui n'ont pas pu être intégrées à cet âge de castration anale , parce que les interdits nécessaires n'ont pas été donnés .
* 2e étape clé : la castration œdipienne ...Selon Françoise Dolto , il est essentiel d'apprendre à l'enfant l'interdit de l'inceste et l'interdit de la sexualité entre adultes et enfants ....lui interdire aussi ce qu'on appelle " les roueries séductrices " à l'égard de ses parents des 2 sexes : on ne se promène pas tout nu au milieu du salon pour séduire les invités , on ne se conduit pas avec maman comme si on était son amoureux ou avec papa comme si on était son amoureuse etc...La castration œdipienne permet à l'enfant d'humaniser ses pulsions sexuelles en comprenant la place de chacun et en comprenant aussi que la sexualité humaine n'est pas , comme chez les animaux , affaire de "bêtes en rut " . La sexualité humaine est soumise à des règles auxquels s'ajoutent le sentiment d'amour , des paroles , le respect de l'autre : il est interdit d'user de sa force pour imposer aux autres des privautés qu'ils refusent .
4. LES PARENTS ONT VALEUR D'EXEMPLE .
Initiateurs de l'enfant aux règles morales , les parents ont eux aussi , pour lui, valeur d'exemple : c'est en les voyant se conduire que l'enfant apprend -ou non - la valeur des règles sociales.
* c'est en fonction de la façon dont ses parents LE traitent et traitent les autres que l'enfant apprend -ou pas - le respect de l'autre .
* c'est toujours aux actes de ses parents et à ce qu'ils ont dans la tête , profondément et surtout inconsciemment que l'enfant s'identifie.
* Selon F.Dolto , l'enfant agit à l'exemple de ses parents parce qu'il les aime et parce qu'ils représentent une image achevée de lui-même vers laquelle il tend .
* Les valeurs morales ne peuvent donc pas se transmettre comme un savoir intellectuel : l'enfant n'y accède pas par le seul discours mais par l'expérience.: grâce à l'éducation donnée par les parents, l'enfant a découvert que le renoncement aux plaisirs immédiats et illégaux est difficile : mais cette souffrance n'est pas vaine car passée cette épreuve , la porte s'ouvre sur des plaisirs plus grands , plus élaborés et socialement valorisés.
EX: l' envie de voir , de savoir , être curieux peut se manifester par le fait d'épier les autres , de les surveiller , de regarder par les trous de serrure ...mais il peut aussi s'exercer dans un autre registre : poussé par son envie de voir , de savoir , par sa curiosité , l'enfant pourra par ex. devenir chercheur : ce processus par lequel les pulsions changent de but , n'est possible que si les interdits sont posés .
* Grâce à ce remaniement profond qui implique la tête et le corps , l'enfant sera habité par ces valeurs morales , sinon il ne pourra pas contenir ses envies si elles sont trop fortes. Ex: ce spot télévisé bien connu illustre cette impuissance des seules paroles face à la force des envies . Une petite fille à l'air effronté , un pot de dessert entamé dans une main , une cuillère dans l'autre et le visage barbouillé de chocolat déclare : « il ne faut pas manger de mousse au chocolat avant le diner sinon tu trahis la confiance que tes parents ont mise à l'intérieur de toi !» ..et à l'appel de son père « à table !» , elle disparait et on entend sa voix qui ,annonçant la marque du dessert , ajoute , comme pour justifier l'écart entre ses paroles et ses actes :
« c'est trop bon ! c'est trop bon !» ..ce spot ne vaut-il pas toutes les leçons de morale ??
* à l'adolescence : Il a les cheveux verts et un anneau dans le nez ? elle parle une langue incompréhensible et ses copains sont à l'opposé exact de ceux que vous souhaiteriez ? cela vous choque ? ça tombe bien : c'est fait pour ça !!
L'adolescence c'est le moment où l'on a besoin de trouver ses propres valeurs et d'être sûr qu'elles ne doivent rien à l'influence des parents.
Alors le bon moyen pour s'en assurer , c'est de DIRE et de FAIRE le contraire de ce qu'ils voudraient pour les entendre hurler . Attitude infantile ? NON ! C'EST PLUTÔT LA PREUVE QUE VOS ENFANTS SONT EN MARCHE VERS LA MATURITÉ : ils font un travail difficile et estimable pour se mettre au monde , tout seuls une seconde fois et s'ils crient si fort leurs valeurs , c'est parce qu'ils ne sont pas sûrs de leur choix .
° Si c'est dur pour vous , rappelez vous que "les ados toujours gentils " qui ne contestent jamais , ce n'est pas , comme les parents le croient , parce qu'ils sont "bien élevés " , c'est parce qu'on ne leur a jamais vraiment donné le droit de penser.
*AINSI , PARENTS , VOTRE RÔLE EST ESSENTIEL , INDISPENSABLE , DÉTERMINANT ! L'éducation que vous allez mettre en place pour votre enfant- dès le berceau - lui permettra de se construire et de grandir : elle fera de lui un enfant épanoui et plus tard un adolescent , puis un adulte adapté à la vie sociale -atouts INDISPENSABLES pour réussir sa vie et dans la vie .Ayez pleinement confiance en vous dans votre rôle de parents en gardant en mémoire cette règle d'or :
DISCOURS + EXEMPLE + EXPÉRIENCE!
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